Un an et demi maintenant que je suis en chimiothérapie pour cette récidive. Hier, c’était la 37e séance. Je ne sais pas si ça vaut la peine de souffler une bougie, mais c’est vrai que ça ne laisse que peu de temps pour souffler… 

Si je refais l’historique, ma récidive a montré ses premiers signes (des taches sur une résonance magnétique) le 17 septembre 2019. Un PET-scan a confirmé l’affaire le 7 octobre. Et le 29 octobre, j’entamais une nouvelle série de chimiothérapies. 

S’ensuivent 12 séances de chimiothérapie, clôturées le 16 avril 2020. L’imagerie médicale confirme début mai que tout semble revenu dans l’ordre: les marqueurs sont bas et on ne voit plus rien sur les images. Je fais péter le champagne dans le bureau de mon oncologue (si si si). 

Début juillet, bardaf! C’est l’embardée. Les métastases sont déjà revenues. En fait elles n’étaient jamais parties. Le truc, c’est que l’imagerie médicale a ses limites. Et quand une métastase atteint une taille inférieure à la résolution de l’imagerie médicale, elle devient indétectable. Vu que les produits de chimio sont une vraie saloperie (mon frère en cancer Alex peut en témoigner, il a vu une poche tomber sur le sol, éclater et faire FONDRE le linoléum de sa chambre), on ne va pas en donner au patient parce que “on ne sait jamais”. Donc, on arrête le traitement et on croise les doigts. Parfois, ça marche. Parfois, ben, ça ne marche pas. 

Belote et rebelote

Nous voilà donc revenus à la case départ: redémarrage des chimios le 16 septembre 2020. Après 6 séances, on se rend compte que Folfiri-Avastin ne fonctionne plus. On passe à la deuxième option: Folfox-Avastin. Il faudra 8 séances pour réaliser que non, ça ne fonctionne pas non plus. Là, je commence à stresser un max: il n’y a que 4 “lignes” de chimio disponibles pour me soigner, et on vient d’en cramer deux coup sur coup. On entame la troisième ligne début janvier 2021. Un traitement aux anticorps (mais ce n’est pas de l’immunothérapie) beaucoup moins douloureux pour l’organisme, mais apparemment beaucoup plus virulent pour les métastases, qui réduisent à la fois leur taille et leur activité. 

Hier, j’en étais à la onzième injection de ce produit. Avec bon espoir qu’on puisse bientôt déclarer victoire. Rendez-vous fin juillet pour le savoir. 

Pourquoi je te raconte ça? 

La question, légitime à ce stade, c’est pourquoi je te raconte ça. La réponse en une phrase: c’est parce que je suis allé me promener dans les bois ce matin. Élaborons…

Ce matin, donc, je suis allé promener les chiens, et je me suis dit que j’allais faire un peu plus long que d’habitude. Après une heure de marche, je suis passé à côté d’un banc à la sortie de la forêt. Et là, j’ai réalisé tout à coup que, il y a à peine quelques mois, j’étais passé par là en balade avec ma chérie et ma filleule, et que j’avais demandé qu’on s’arrête 5 minutes pour reprendre mon souffle. Là, je suis passé à côté comme une fleur, tranquillement, pas essoufflé, pas fatigué, mal nulle part. Ce qui est finalement normal pour un gars de mon âge – j’ai 48 ans. 

Normal pour un gars de mon âge, mais pas pour un malade du cancer en plein traitement. Me dire que trois mois auparavant, je traînais encore la patte m’a fait un bien fou. Ca expliquait beaucoup de choses, y compris ma difficulté à me remettre à l’activité physique. C’est facile de s’en vouloir et d’oublier que la chimio, ça te fout par terre. Big time. 

Take it easy! 

Alors voilà, je l’ai déjà dit, mais je le redis, ma soeur et mon frère en cancer: vas-y mollo et sois patient(e). Rome ne s’est pas faite en un jour. Et récupérer d’une chimio, c’est plus dur qu’on ne l’imagine, et surtout qu’on voudrait bien que ce soit. C’est pour ça que je me suis amusé à faire les comptes ce matin. Et, effectivement, quand je regarde les chiffres, je me dis qu’effectivement, il y a de quoi être à la ramasse après 26 séances de chimiothérapie lourde. On parle quand même de produits qui, à chaque fois, me laissaient KO et incapable de faire quoi que ce soit pendant deux ou trois jours. Et je me rappelle très bien qu’en janvier, j’étais au bout de ma vie: niveau d’activité proche du concombre de mer et moral dans les chaussettes. Là, ça fait cinq mois que je prends un truc “doux” (si j’ose dire). Cinq mois à peine. Tu m’étonnes que je ne sois pas encore au top. Et pourtant, ce matin, sur mon chemin, il y avait ce banc. Et bien, je n’ai Jamais eu autant de plaisir à voir un banc!