Lutter contre son cancer, c’est une course de fond. Les jours passent, puis les semaines, les mois, et parfois les années. Inévitablement, tu connaîtras des passages à vide. Comment les gérer?
Les « astuces » que je livre ici sont forcément très personnelles, ce sont celles qui ont fonctionné dans mon cas. Peut-être y trouveras-tu de l’inspiration, peut-être pas. Mais j’espère que partager mes passages à vide et mes moments de doute t’aidera. On en a tous, et ça ne sert à rien de les nier.
Avant tout, accepter
On a tous des passages à vide. Des grands, des petits, mais on en a. La fatigue y est parfois pour beaucoup. Entre les effets secondaires de la chimiothérapie, ceux de la radiothérapie, et les conséquences des opérations, notre corps est parfois poussé dans ses derniers retranchements. Avec, inévitablement, un effet sur le moral. C’est comme ça, on n’y peut rien. De toi à moi, j’ai plutôt une mentalité de battant. Un peu trop, même. Et du coup, j’ai du mal à accepter mes moments de faiblesse. Depuis le début de l’année 2018 – le moment où les symptomes de mon cancer se sont manifestés – jusque maintenant, j’ai dû faire l’apprentissage de cette faiblesse. Accepter mes moments de « down », mes périodes de doute. Accepter que, par moments, j’ai peur d’y rester. Peur qu’une opération foire, peur que malgré la chimio la tumeur reprenne du poil de la bête. Accepter avec douceur. M’autoriser à ressentir la peur et le doute, laisser venir les larmes quand tout devient trop difficile. Parce que les baisses de moral sont plus faciles à surmonter une fois qu’on accepte qu’elles sont là et qu’on n’y peut pas grand chose.
Découper le temps en séquences
Le plus dur pour le moral, c’est l’écoulement des semaines. Une fois que tu es embarqué dans la traversée, tu ne sais pas combien de temps elle va durer, ni quelle en sera l’issue. Pour lutter contre l’incertitude et l’angoisse qu’elle entraîne, je te conseille de découper ton traitement en phases. Ca permet de réintroduire des échéances, et donc de la finitude et une dose de certitude.
Dans mon cas, et pour le moment, le découpage a été le suivant:
- La phase « diagnostic »: entre la détection de la tumeur et le moment où ton oncologue te propose un plan d’action, il peut s’écouler plusieurs semaines. Une période particulièrement difficile à vivre, parce que personne ne connait encore vraiment la gravité de la situation. Mais en principe, si tout va bien, tu as un « planning » des différents examens et tu sais quand aura lieu l’entrevue de « stratégie » avec ton oncologue. Prends le temps de te faire expliquer à quoi correspond chaque examen, et ce qu’on recherche. Dans mon cas, la colonoscopie a permis de détecter la tumeur et son étendue en surface. L’écho-endoscopie a servi à déterminer à quelle profondeur elle s’enfonçait dans la paroi du côlon. Le « CT thoraco-abdo » a permis de détecter s’il y avait des métastases aux endroits « classiques » pour les tumeurs comme la mienne (foie et poumons). Le PET-scan a permis de re-répérer les métastases connues et de s’assurer qu’aucun ganglion lymphatique distant n’était atteint. À chaque fois, je me disais « OK, on en sait un peu plus, c’est une étape de plus. Et je savais que fin février, on m’implanterait le « portacat » (un cathéter inséré sous la peau et « branché » directement sur un des ventricules cardiaques). Et je savais que le 1er mars, ce serait le rdv avec mon oncologue et la première séance de chimiothérapie.
- La phase « chimio + radio »: de la première chimio à la radiothérapie, je savais que cette deuxième étape consisterait à « affaiblir » ma tumeur et mes métastases, histoire de réduire leur dynamisme et de préparer la suite. À l’intérieur de cette phases, quelques nouveaux tests serviraient à déterminer l’efficacité du traitement. Dès le départ, il était clair – sauf problème en cours de route, bien sûr – que la radiothérapie constituerait une espèce de point d’orgue. Entre la fin de la radiothérapie et les opérations, il y a en effet un délai à respecter.
- La phase « chirurgie »: elle a commencé il y a un mois, et se poursuivra jusqu’à la fin des grandes vacances. Pour moi, c’est un moment « décisif », car à l’issue de ces deux mois, je n’aurai plus ni ma tumeur ni mes métastases. Mon corps sera « nettoyé ». Le combat ne sera pas fini, mais entrera dans sa phase finale.
- La phase « post-op »: celle-là, je ne sais pas encore combien de temps elle va durer. Mais ce sera le dernier gros combat. Après, faudra s’axer sur le préventif: sport, alimentation…
Méditer
Oui, tu as bien lu. Méditer, ça fait un bien fou. C’est un merveilleux outil de gestion de soi, mais aussi de gestion de la douleur. En toute honnêteté, je ne médite pas autant que je le devrais, mais ça aide quand même pas mal.
Si tu veux tenter l’expérience, il y a une app très chouette en Anglais: Headspace. C’est celle que j’utilise. Une autre, un peu moins chouette mais pas mal, en français: Petit Bambou. Et puis, tu peux aller suivre un atelier de pleine conscience, ça aide aussi. Il y en a un chouette chez Therapsy, à Bruxelles. Et ils proposent quelques pistes Audio pour t’aider à méditer.
Te fixer de petits objectifs plaisir
Une amie médecin m’a dit un jour: « Fred, tu déconnes. Tu vis cancer, tu manges cancer, tu dors cancer, tu rêves cancer. Faut que tu sortes de ça ». Et elle avait raison. J’avais essayé de me fixer des objectifs, mais ils étaient tous du type « Quand ce cancer sera fini, je ferai ceci ou cela ». Du coup, c’est comme si je mettais toute ma vie entre parenthèses. Maintenant, je me mets des petits objectifs plaisir en place. Ils tiennent compte des difficultés liées à ma tumeur, mais m’aident beaucoup. Un exemple? Je viens de passer mon permis théorique moto. Je m’étais promis de le passer entre mes deux premières opérations. Et je veux passer mon pratique pendant les grandes vacances (oui, entre les opérations suivantes, sinon c’est pas fun). Ca m’aide, ça remet de choses sympa dans le quotidien. Et ça me sort d’une pensée centrée uniquement sur ma maladie.
Il y a encore sûrement plein d’autres trucs à faire, n’hésite pas à faire d’autres suggestions dans les commentaires, surtout si toi aussi tu es passé(e) par là. Et courage!